Depuis son accession à l’indépendance le 27 avril 1960, le Togo a connu une histoire politique mouvementée marquée par de nombreuses manifestations et mouvements de protestation, principalement sous le régime de la famille Gnassingbé. Ces mobilisations populaires reflètent principalement des aspirations démocratiques d’un peuple en quête de liberté, de justice sociale et de bonne gouvernance depuis de nombreuses années.

Les premières années postindépendance (1960-1967)

Le Togo accède à l’indépendance le 27 avril 1960 sous la direction de Sylvanus Olympio, qui devient le premier (et seul véritable) président de la République en 1961. Les premières années de l’indépendance du Togo sont marquées par une volonté d’autonomie, à la fois au niveau économique et politiques.

Cependant, des tensions émergent rapidement autour de plusieurs enjeux :

  • Les revendications des anciens combattants : Les vétérans de l’armée française manifestent pour obtenir leur intégration dans l’armée togolaise.
  • Les grèves syndicales : Les travailleurs organisent des mouvements de protestation pour de meilleures conditions de travail.
  • Les tensions ethniques et régionales : Des manifestations éclatent entre différentes communautés et ethnies du pays.

Ces tensions culminent avec l’assassinat du président Olympio dans la nuit du 12 au 13 janvier 1963, ce qui constitue le premier coup d’État dans les anciennes colonies françaises et britanniques d’Afrique ayant accédé à l’indépendance dans les années 1950-1960.

L’intermède Grunitzky (1963-1967)

Sous la présidence de Nicolas Grunitzky, les manifestations se multiplient en raison de l’instabilité gouvernementale, les revendications estudiantines et les protestations contre la détérioration de la situation économique.

L’ère Eyadema : répression et résistance (1967-2005)

Le coup d’État du 13 janvier 1967 porte Gnassingbé Eyadéma au pouvoir. Cette période est caractérisée par une forte répression des mouvements de protestation, mais aussi par une résistance persistante de la société civile.

Les manifestations des années 1970-1980

Malgré la répression, plusieurs mouvements de protestation émergent comme des grèves étudiantes. En 1975, plusieurs manifestations ont eu lieu à l’Université de Lomé contre les conditions d’études mais aussi en 1979 avec une grève générale des étudiants qui a été violemment réprimée puis en 1985 avec des nouvelles mobilisations estudiantines.

Les protestations syndicales

Parmi ces protestations, on en retient des grèves des enseignants pour de meilleures conditions de travail mais aussi des manifestations des employés du secteur public et des mouvements de protestation des commerçants contre les politiques économiques.

La décennie “démocratique” (1990-2000)

L’année 1990 marque un tournant décisif avec le vent de démocratisation qui souffle sur l’Afrique. Au Togo, cette période est marquée par les manifestations de 1990-1991. Tout d’abord, en octobre 1990, on enregistrait les premières grandes manifestations pour une véritable démocratie au Togo. Puis, une grève générale illimitée a eu lieu à partir du 16 novembre 1990 avec la formation du Front des Associations pour le Renouveau (FAR) dans la foulée. En 1991, la Conférence Nationale Souveraine voit le jour, notamment avec une certaine mobilisation massive de la société civile, des manifestations de soutien aux travaux de la Conférence et des tentatives de déstabilisation par le pouvoir en place.

Les années de plomb (1991-1993)

Cette période est marquée par une violence politique extrême des manifestations réprimées dans le sang, un exode massif vers le Ghana et le Bénin, des grèves générales à répétition et une réelle formation de milices pro-gouvernementales.

La normalisation progressive (1993-2005)

Après les accords de réconciliation, les manifestations deviennent plus sporadiques mais persistent notamment avec des protestations électorales lors des scrutins de 1993, 1998 et 2003 mais aussi de manifestations de l’opposition contestant les résultats et des mouvements de la société civile pour la transparence électorale.

L’après-Eyadema : continuité et contestation (2005 à aujourd’hui)

L’arrivée au pouvoir de Faure Gnassingbé en 2005 déclenche une nouvelle vague de protestations avec des manifestations contre la succession dynastique mais aussi un certain degré de violence post-électorale faisant plusieurs centaines de morts ainsi qu’une mobilisation de l’opposition et de la société civile.

Les grandes manifestations de 2017-2018

Cette période marque l’apogée des mouvements de protestation modernes au Togo. En 2017 et 2018, des manifestations organisées par l’opposition et la société civile ont eu lieu pour limiter à deux le nombre de mandats présidentiels.

Les manifestations pacifiques de grande ampleur ont commencé le 19 août 2019 avec un usage massif des réseaux sociaux et une coordination entre opposition et société civile (Coalition des 14 – C14). Il y avait également des marches hebdomadaires dans tout le pays.

Le gouvernement profitait des manifestations pour exercer une forme de répression gouvernementale en interdisant les manifestations dans le centre-ville de Lomé mais aussi par des arrestations de leaders de l’opposition, des coupures d’internet lors des manifestations et un usage disproportionné de la force ayant causé plusieurs morts.

Les manifestations récentes (2019-2024)

En 2019, les députés togolais ont voté la révision constitutionnelle prévoyant la limitation du nombre de mandats présidentiels, mais cette réforme permet également à Faure Gnassingbé de se représenter aux scrutins de 2020 et 2025. Malgré cette adoption, les protestations se poursuivent avec la contestation des élections présidentielles de 2020, les multiples condamnations sévères des manifestants de 2018 (14 personnes condamnées à 10 ans de prison en février 2025), l’adoption d’une nouvelle loi restreignant fortement les manifestations publiques en 2019, des manifestations contre la cherté de la vie ainsi que des mouvements de grève dans différents secteurs.

Plus récemment, en 2024, le parti au pouvoir a modifié la constitution pour éliminer le suffrage universel direct pour élire le président et transformer le pays en système parlementaire, supprimant de facto les limites de mandats présidentiels.

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